La narration chorale est toujours aussi dense et singulière, et Pirus parvient, avec ses mots froids et détachés, d’une précision glaçante, à perturber le réalisme du récit, dérangeant. Famille, amour, sexe, en décrivant avec précision le mal-être de ses personnages, Pirus révèle la quantité de résignation, de folie, d’incertitude, de frustration, d’angoisse et de violence qui les habite. Les graphismes de Mezzo complètent idéalement cette plume acerbe.
Dans la veine d’auteurs américains comme Daniel Clowes ou Charles Burns, le trait semble toujours peiner à s’extraire de l’ombre, et distille une tension angoissante, renforcée par les couleurs de Ruby, toujours étranges. Le fantastique pointe alors le bout de son nez, non pas lorsque des fantômes nous racontent leurs atermoiements, paradoxalement, mais lorsque l’ambigu et l’introspection se mêlent pour mieux nous impressionner.
Un album extrêmement bien écrit, à l’esthétique éprouvante, qui confirme l’importance du ‘Roi des mouches’ dans la bande dessinée moderne.
L’Origine du monde Le Roi des mouches – Tome 2 de Mezzo et Pirus, Editeur : Drugstore, 2008