Chronique de Succession 1, de  Scott Westerfeld

Les progrès technologiques actuels nous obligent à réévaluer la place symbolique de l’être humain dans notre société. Notre vision du corps a radicalement changé avec la montée en puissance de la technologie (en particulier des biotechs avec leur cortège de trouvailles : décodage du génome humain, clonage, remèdes anti-vieillissements, etc.) Mais envisageons l’avenir. Quel degré de mutation physiologique l’humanité du futur est elle prête à subir pour passer l’étape au-dessus ? Sommes-nous prêt à accepter les transformations physiques, forcément indispensable au très long voyage dans l’espace et, à quel point ces transformations feront encore de nous des humains ? Au final, sommes-nous prêt à abandonner ces attributs, et la vision de nous avons de nous-mêmes ?

Ces questions semblent hanter toute la science-fiction du 21ième siècle. C’est particulièrement vrai pour le NSO (New Space Opera) incarné par Ian Banks, Alastair Reynolds (le fameux Diamond Dogs/Turquoise Days chez Pocket), Richard-Paul Russo, Peter F. Hamilton ou Scott Westerfeld (entre autre, j’oubli les nombreux auteurs non traduits en France). Et c’est d’ailleurs tout l’intérêt de ce genre.
De Westerfeld il sera question ici puisque l’été nous apporte la première partie de son épopée : « Succession », Risen Empire (en Français, hideux comme d’habitude, « Les Légions Immortelles »). On se souvient du très beau l’I.A. et son double, texte profondément érotique (pornographique même, selon certains), étrange histoire d’amour « physique » entre une intelligence artificielle robotique et une jeune femme. Autant le dire tout de suite, « Succession » est de la même trempe. Imagination, sens of wonder indispensable au genre, profondeur des personnages, même s’il paraît en poche, il s’agit du space opéra de l’été. Un digne successeur (le titre serait-il un double clin d’œil ?) à la saga de Peter F. Hamilton (un peu boursouflée, même si passionnante, il faut bien l’avouer) ou mieux, au techno-space op’ d’Alastair Reynolds, dont l’étonnante tétralogie des Inhibiteurs en a déjà soufflé plus d’un.

Introduit par une prise d’otage sanglante, ce premier tome s’éloigne très vite des archétypes de la science-fiction militaire pour s’engager dans la voix d’une réflexion sur l’intelligence. Intelligence mécanique auto-induite contre intelligence humaine, tel est le conflit qui anime cette série. Plus simplement, comme je me le demandais, il y a quelques années, Westerfeld se pose les mêmes questions que Jean-Michel Truong, l’auteur du Successeur (décidément!) de Pierre . De fait, dés le premier tome, certains personnages devront abandonner une part de leur humanité pour comprendre l’étendu du combat à l’œuvre, tout comme les machines devront parfois s’humaniser pour survivre. Mais ne vous arrêter pas à ces quelques lignes, comme dans L’I.A. et son double, le sujet est traité avec beaucoup de finesse et… d’humanité !

Un bel exemple de prospective et un formidable moment de lecture. A suivre, donc…

Scott Westerfeld, Succession 1, Les Légions Immortelles – Pocket

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